dimanche 24 octobre 2010

France vs Québec - La question récurente

De par mon accent audible, ma fâcheuse tendance à être bougonne et ma sale habitude de demander aux élèves de sortir leur gomme, je ne peux pas cacher mes origines très longtemps. Alors une question récurrente revient chez mes collègues d'un jour: "Et chez vous, l'école, c'est comment ?"

Ne vous y méprenez pas, j'aime mon pays et même si je ne suis pas toujours tendre avec lui, il y a de très bonnes choses là bas. Mais quand on émigre, on a tendance à voir tout blanc d'un côté et tout noir de l'autre. Alors pour le moment, je vois l'éducation au Québec de mes yeux de toute nouvelle et celle de la France de mes yeux de presque vieille aigrie.

Alors voilà quelques passages d'une conversation sur le sujet avec une personne qui hésitait à envoyer ses enfants à l'école française:

"Au moins, le Québec peut se vanter d'offrir une vraie formation à ses futurs professeurs et le système veut qu'une personne qui n'aime pas ce métier va facilement quitter les rangs.
En France, le concours et tellement difficile à obtenir et les avantages (sécurité de l'emploi, bien plus de congés qu'au Québec, statut de fonctionnaire) tellement mis en avant que très peu vont quitter leur emploi même s'ils n'aiment pas ça.
Résultat, on trouve une belle bande d'incompétents\je-m'en-foutistes qui viennent ternir l'image de ceux qui ont leur travail à cœur.
Je ne compte même plus les fois où des professeurs m'ont dit que si la situation économique de la France n'était pas si mauvaise et qu'ils avaient réussi à faire quelque chose de leur licence (= baccalauréat), ils auraient laissé tomber l'enseignement.

J'ai pu voir une différence entre vos 1ère année et les nôtres qui sont un peu plus avancés à leur entrée au primaire. Normal, chez nous le préscolaire et quasi un passage obligé pour nos petites tête blondes et on y voit déjà l'alphabet et souvent un début de calligraphie.
Mais à côté de ça, vos enfants sont tellement plus débrouillards que les nôtres !
C'est ce que j'aime ici: on ne se contente pas de leur fournir des connaissances, on leur apprend aussi à être autonomes et responsables.
Autonomes, les enseignants le sont aussi et sont assez libres dans leurs programmes, tant qu'il est conforme aux exigences du MELS. Je n'ai pas encore vu une seule classe qui utilise les mêmes méthodes\supports et je trouve que c'est une grande richesse pour les enfants. L'enseignant peut ainsi mieux s'adapter aux besoins de la classe.

Les besoins, parlons-en ! Des psychologues, des orthopédagogues sont venus dans mes classes pour proposer leurs services aux élèves. Une orthophoniste venait en chercher trois durant une période pour les aider avec leur prononciation. Une autre professionnelle du langage vient une fois par semaine donner un atelier pour l'apprentissage des méthodes lecture.Le cours d'éducation physique, c'est un prof de sport qui le donne, idem pour l'art plastique.
En France l'enseignant est seul maitre à bord et, à ma connaissance, il n'y a pas de spécialistes de ce genre dans les écoles primaires. C'est comme demander à quelqu'un d'être à la fois boulanger, boucher et poissonnier.

Ce que j'aime par dessus tout, c'est la politique de renforcement positif: il faut toujours tirer l'enfant vers le haut. Mon dieu, comme j'aime pouvoir dire à un enfant "t'es capable" sans me prendre une réflexion du type "arrête de rêver, il n'arrivera à rien ce gamin" par un collègue blasé.
On rejoint un peu l'idée de beaucoup de français sur le Québéc: "le monde des bisounours, tout le monde il est beau et gentil" ...
N'empêche que ça marche, parfois.

Il y a beaucoup moins ce rapport de force entre enseignant et élèves. Le "tu me dois le respect parce que je suis ton supérieur, point" est très mal vu.
Et en y réfléchissant bien, l'école est vraiment le reflet de la société et je pense que les rapports élèves\enseignants vont ressembler à ce que l'on trouve dans le monde du travail ici entre patron et employés.
Mettre son enfant à Marie de France ou Stanislas, c'est accepter le fait qu'il apprendra un autre code de conduite, une autre forme d'éducation et qu'il va devoir faire un travail d'adaptation par la suite.
L'école, ce n'est pas qu'une usine à "petits génies". C'est aussi et surtout un endroit où l'on apprend à devenir de bons citoyens, à socialiser, à intégrer les bons codes de vie. Sur ces points, je trouve que l'école québécoise a une longueur d'avance et que, de toute façon, c'est la seule à être adaptée pour remplir ce rôle au ... Québec.

J'aurais aimé qu'on me donne davantage confiance en moi et que je ne me trouve pas prise au dépourvu quand un professeur d'université me demande mon avis. Parce qu'encore à l'heure d'aujourd'hui, j'ai beaucoup de mal à me sortir de cette mentalité française qui veut que nous ne sommes que de bons petits soldats qui travaillons durs à la tâche, absorbons tous les savoirs que l'on nous donne et donnons toujours raison à cet être supérieur qui nous fait office de professeur.

Le système québécois n'est pas parfait, loin de là. Mais il n'est pas non plus à blâmer.
Pour une éducation parfaite, pensez aux pays nordiques. Parait qu'ils sont pas mal bon là dedans ..."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire